Le Kiosque Média

"Notre métier n’est ni de faire plaisir, ni de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie." - Albert Londres

11.12.2005

> Edward R. Murrow, un journaliste admirable; le film et le contexte


Good Night and Good Luck, réalisation de Georges Clooney. Avec David Strathairn, Georges Clooney et Patricia Clarkson.
Georges Clooney s’attaque à une page très « rouge » de l'histoire américaine.

Ce qu’on appelle désormais dans l’histoire américaine le « maccarthysme » commence à prendre forme en 1946, sous la gouverne du président Truman. Les Etats-Unis entrent alors en pleine guerre froide avec l’URSS : c’est une guerre idéologique entre les communistes et les démocraties. On est aussi en pleine guerre de nerfs car les deux grandes puissances possèdent des armes nucléaires, qu’elles peuvent utiliser à tout instant. On crée en 1946 une commission afin d’enquêter sur les activités « subversives » des fonctionnaires fédéraux. La commission d’enquête vise ceux qui auraient une appartenance aux groupes communistes, fascistes ou totalitaires : les rouges. On parle alors des « security risks », des individus jugés dangereux pour la sécurité du pays. Il faut dire que la propagande communiste qui fait rage en Europe fait des adeptes en Amérique. L’espionnage pour le compte des Soviétiques est une menace réelle qui plane sur l’administration américaine et qui permet à l’URSS des avancées dans ses recherches nucléaires.
Durant cette période de tensions avec l’Est et de guerre qui débute entre la Corée du Nord communiste et celle du sud en 1950, la peur de l’ennemi communiste atteint son paroxysme aux Etats-Unis. La population est prête à justifier un « nettoyage » à l’intérieur du pays : la chasse aux sorcières du sénateur républicain Joseph McCarthy peut alors commencer et ne rencontre pratiquement aucune résistance. Le maccarthysme devient cependant une période moins glorieuse quand la commission se met à accuser des individus en raison de relations jugées louches et que les délations remplacent pratiquement les enquêtes. De simples doutes suffisent désormais pour renvoyer un fonctionnaire, à défaut de preuves véritables.
Georges Clooney campe son plus récent film, Good Night and Good Luck, dans ce contexte politique et historique. Relatant la confrontation publique qui opposa l’animateur de télévision Edward R. Murrow et le sénateur McCarthy, le film s’attarde au travail de l’équipe de CBS qui eut un impact certain sur la chute du sénateur en 1954.
Durant l’émission See it Now, Murrow et ses collaborateurs s’attaquèrent aux abus de Joseph McCarthy dans sa chasse aux communistes. Reprenant certaines citations controversées du sénateur et donnant la parole à un homme arrêté sur la base de rumeurs d’appartenance communiste, l’équipe de See it Now fut une des seules voix à s’élever contre le maccarthysme.
David Strathairn est parfait dans le rôle de l’animateur Murrow. Cigarette à la main, cheveux gominés et regard sévère, il incarne à lui seul l’ambiance des années 50 que Georges Clooney a voulu recréer. Outre une distribution excellente et une bande originale qui sert parfaitement le climat du film (merveilleuse voix de Diane Reeves), le plus grand intérêt de Good Night and Good Luck réside sans aucun doute dans son caractère très actuel. Le réalisateur souligne à gros traits les similitudes entre le discours de Joseph McCarthy et celui du président actuel des Etats-Unis. La lutte au terrorisme de Georges Bush trouve un écho dans la lutte au communisme de McCarthy : « Ceux qui ne sont pas avec nous sont contre nous! »
Si Clooney manque parfois de subtilité dans son propos (« We are wealthy, fat and compleasant », en parlant du peuple américain…), il réussit néanmoins à pousser la réflexion au-delà de la simple page historique du maccarthysme. Le personnage de Murrow reproche au gouvernement, dans un discours final, de défendre la liberté ailleurs dans le monde et de la refuser à l’intérieur même du pays. En parlant ensuite de McCarthy, il dit que s’il n’a pas créé la peur, il a toutefois su l'utiliser. Le parrallèle est on ne peut plus clair.


Sarah Poulin

Pour en savoir plus

http://www.washingtontimes.com/books/20031122-112958-5229r.htm
http://fr.wikipedia.org/wiki/Maccarthysme
http://www.clooneynetwork.com/movies/goodnight/
http://wip.warnerbros.com/goodnightgoodluck/

1 Comments:

  • At 14 novembre, 2005 15:12, Anonymous Anonyme said…

    Je seconde. Un très beau film, et une très belle leçon de courage et de journalisme.

     

Publier un commentaire

<< Home

 
Top Blogues