Comprendre le problème du porc en 500 mots
Le porc allait mal l’an dernier. Il va encore aussi mal. Si on n’y comprend toujours rien c’est que les journalistes font du cas par cas : une grève ici, une fermeture là, un porte-parole syndical, un porte-parole patronal et l’éternel Laurent Pellerin président de l'Union de producteurs agricoles. Ce dernier comprend très bien l’ensemble de la question ce qui ne veut surtout pas dire qu’il peut l’expliquer, la synthèse n’étant pas son fort comme on peut le constater en écoutant l’entrevue-monologue qu’il a donné à France Beaudoin de Radio-Canada.(voir onglet de droite).
Pourtant, résumer la question, simplement, clairement est possible et c’est qu’a fait Philippe Mercure le 23 janvier dernier dans La Presse. En quelque 500 mots. Brillant ! Nous reproduisons ici l'article recueilli sur le site internet de La Presse.
La Presse
23 janvier
Le casse-tête de Lucien Bouchard
Mercure, Philippe
L'abattoir de Vallée-Jonction est l'une des pièces d'un immense casse-tête qui vise à restructurer le secteur de l'abattage de porcs au Québec. Et tous les yeux sont actuellement braqués sur celui qui en placera les plus gros morceaux: Lucien Bouchard.
Maurice Doyon est professeur au département d'économie agroalimentaire de l'Université Laval. Donnez-lui la possibilité de redessiner l'industrie du porc au Québec et il vous construira illico deux immenses abattoirs: l'un dans l'ouest de la province, l'autre en Beauce.
Ajoutez une poignée d'abattoirs de petite taille pour des produits spécialisés -porc biologique et autres- et vous avez la recette pour remettre l'industrie du cochon québécois sur ses pattes. Kevin Grier, analyste au Centre George Morris -un think-tank ontarien indépendant qui se penche sur les questions agricoles- pense exactement la même chose. Pour lui, la première condition d'une relance de la filière porcine au Québec est la présence de gros abattoirs modernes qui roulent à plein régime.
L'ancien premier ministre Lucien Bouchard est actuellement placé dans la même situation que celle soumise à ces deux experts par La Presse Affaires. Son plan de relance est attendu pour les prochaines semaines. Sauf que lui est mandaté par Olymel -une entreprise qui, en abattant plus de 60% des porcs québécois, influence directement l'ensemble de l'industrie québécoise. Et il ne peut pas repartir complètement à zéro.
Le portrait qui se présente à M. Bouchard est celui d'un territoire québécois parsemé d'abattoirs de petite taille -14 usines appartenant à 10 entreprises- dont aucun n'est assez gros pour rivaliser avec les meilleurs au monde. Vallée-Jonction et sa capacité de 37500 porcs par semaine? "C'est peut-être le plus gros au Québec, mais il ne correspond pas aux nouveaux standards. Les abattoirs dont je vous parle ont des capacités d'au moins 70 000 porcs par semaine", dit M. Grier.
M. Bouchard arrivera-t-il aux mêmes conclusions que M. Doyon et M. Grier? Et si oui, quelle place l'abattoir de Vallée-Jonction occupera-t-il dans les plans d'Olymel? L'entreprise, pour l'instant, ne laisse rien filtrer de ses intentions. Et ceux qui suivent le dossier se perdent en conjectures.
"Je ne comprends pas très bien la stratégie d'Olymel, avoue M. Doyon, de l'Université Laval. Est-ce qu'on fait une proposition (aux employés) en sachant très bien qu'elle sera jugée inacceptable (et que l'usine fermera)?"
Olymel jure que non. "Nous voulons sauver Vallée-Jonction", répète le porte-parole d'Olymel, Richard Vigneault. L'entreprise soutient cependant qu'avec la rémunération actuelle des employés, effectivement plus haute que chez les concurrents, l'usine ne peut pas être rentable.
Olymel pourrait-elle fermer Vallée-Jonction et construire un autre abattoir -gros et moderne- au Québec? "Dans ce cas, il faut arriver avec de gros capitaux. Et Olymel, selon ses propres chiffres, a perdu 150 millions au cours des trois dernières années", rappelle Kevin Grier, qui se garde bien de vouloir dire à l'entreprise comment gérer ses affaires.
Le deuxième transformateur au pays après Olymel, lui, a annoncé ses intentions... que les producteurs du Canada anglais ont avalées de travers. Maple Leaf recentrera toutes ses activités à son usine de Brandon, au Manitoba. Ses cinq autres abattoirs? Ils sont à vendre. L'entreprise se retire carrément des marchés d'exportation de porc frais, et misera sur des produits à haute valeur ajoutée.
Une des conséquences de cette restructuration risque d'être la fermeture définitive de l'abattoir de Burlington, en Ontario, une usine jugée désuète qui abat plus de 43000 porcs par semaine. Les producteurs québécois font déjà des cauchemars où des milliers de cochons ontariens inondent le marché québécois et font chuter les prix. Maurice Doyon, de l'Université Laval, y voit plutôt une "superbe opportunité pour nos transformateurs" si ceux-ci savent en profiter, ce qui pourrait relancer le secteur au complet.
De quoi alimenter les réflexions de M. Bouchard sur une industrie où les cartes sont en train d'être complètement rebrassées.
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