Le Strip-Tease d’une danseuse : confidences de Natacha
Le Strip-Tease d’une danseuse : confidences de Natacha
Par Annie Pilotte et Louis Gosselin
Lanctôt Éditeur, 2007
124 pages
Il y a environ 5000 bars au Québec, dont 235 sont des bars de danseuses. (Selon la Corporation des propriétaires de bars, de brasseries et tavernes du Québec.)
Combien de danseuses y travaillent? Difficile d’y répondre, puisqu’il n’existe aucune statistique à cet effet. En revanche, est-ce que toutes les danseuses sont cochonnes? Sont-elles toutes idiotes, paumées, droguées, alcooliques, bisexuelles ou lesbiennes? Font-elles toutes de la prostitution? Sont-elles obligées de coucher avec les propriétaires pour obtenir du travail? Ont-elles un pimp? Sont-elles issues de milieux défavorisés? Sont-elles victimes ou le font-elles par choix éclairé?
Voilà, ce que Le Strip-Tease d’une danseuse : confidences de Natacha, effeuille pour nous au fil des pages.
«J’ai 27 ans. Je danse dans les clubs du Québec depuis plus de cinq ans maintenant. J’ai tout vu. Tout entendu. Aujourd’hui je veux essayer de sortir de ce milieu, mais cela ne sera pas facile. La tentation sera forte de retourner gagner jusqu’à 500 ou 600 dollars net en une soirée au lieu de me contenter d’un salaire hebdomadaire. Et dire que j’ai toujours été très timide et pas nécessairement attirée par le sexe! Que s’est-il passé dans ma vie? Aujourd’hui, je peux témoigner du quotidien de la vie d’une danseuse nue, des conditions de travail, de la clientèle et de ses demandes particulières…»
Ici, l’expérience d’Annie Pilotte est relatée par le journaliste Louis Gosselin. Celui-ci nous fait pénétrer dans l’intimité de l’isoloir, comme si nous y étions. Nous suivons le parcours de la strip-teaseuse, de son enfance solitaire et difficile à sa vie active comme danseuse, en passant par son amour d’adolescente et ses premiers emplois. On nous transporte dans les clubs de danseuses de Montréal, de Cornwall, de Québec, de Rimouski… et même de Miami.
L’intérêt du livre réside dans le fait qu’il n’y ait pas d’opinions tranchées, que tout n’y soit pas noir ou tout blanc. Le récit est lucide : il ne glorifie pas le métier, mais nous épargne les leçons de moralité. Il ne fait pas non plus dans le sensationnalisme, et s’éloigne du ton alarmiste employé par certains experts depuis quelques années (voir Yolande Geadah, Richard Poulin ou Micheline Carrier). L’expérience est assumée. «Pour moi, danser nue, est un métier comme un autre, qui me permet de faire de l’argent rapidement et sans effort. Rien de plus», avance Annie Pilotte. Le ton est intimiste, accessible, et colle à la réalité du milieu dans lequel il nous introduit. Finalement, les meilleures personnes pour nous parler du métier ne sont-elles pas les danseuses elles-mêmes?
Et surtout, messieurs, «n’allez jamais croire que la danseuse qui se trémousse devant vous est une fille vulnérable dont vous pouvez tirer tout ce que vous voulez», prévient Annie Pilotte. «Elle a sans doute autant sinon plus de caractère que vous.»
Lyne Corriveau
Extraits :
– Ouais…mais juste pour moi, OK? Fais-moi une faveur…, demandent-ils.
– Hé, chose! T’es le cinquantième à me le demander ce soir! Qu’est-ce que tu as de plus que les autres?
Ma réponse était chaque fois nette et cinglante. Et à l’occasion, je pouvais même ajouter que, s’il me léchait un sein pendant que je dansais, il serait probablement le quatorzième à lécher le même endroit et que c’était à ses risques et périls parce qu’une hépatite c’est contagieux! C’était habituellement l’argument massue pour les garder tranquilles. Devant le sexe, les hommes ne pensent plus. (p.46)
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